Les premiers hommes ne mangeaient pas avec les mains !

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Crédit : Ariel David

Selon une étude réalisée par le Dr. Rachel Sarig, anthropologue et chercheuse au Département d’orthodontie de l’Université de Tel-Aviv sur 13 dents humaines datant de 200 à 400 000 ans trouvées sur le chantier de fouilles de la grotte de Qesem, à proximité de Rosh HaAyin (25 km à l’est de Tel-Aviv), les premiers humains mangeaient à l’aide de couverts primitifs en silex avec lesquels ils découpaient leur viande.

L’étude, qui vient d’être publiée dans la revue Quaternary International, révèle en outre qu’ils possédaient des mâchoires énormes et beaucoup plus puissantes que celles de l’homme moderne.

D’après les marques de dents repérées sur les ustensiles alimentaires retrouvés sur le terrain, les chercheurs ont pu reconstituer la manière dont les premiers hommes consommaient leur nourriture : ils tenaient la viande entre leurs dents, en la tirant d’une main, et en coupaient des morceaux de la taille d’une bouchée à l’aide d’une petite lame de silex très tranchante qu’ils tenaient dans l’autre.

Le Dr. Sarig a examiné au microscope électronique 13 dents d’êtres humains retrouvées dans la grotte de Qesem, chantier de fouilles exceptionnel dirigé par le Prof. Avi Gopher, chef du Département d’Archéologie de l’Université de Tel-Aviv, découvert par hasard en 2000 lors de la construction d’une route, et sur lequel ont déjà été retrouvé entre autre un trésor d’outils en silex et en os d’animaux, ainsi que les vestiges du plus ancien foyer connu pour la cuisson de la viande.

Toutes les 13 dents, sauf deux, appartenaient à des personnes différentes, enfants ou adolescents, et ont été datées à différents moments d’une période s’étendant sur près de 200 000 ans,  pendant laquelle des hominidés ont vécu dans la grotte. Selon le Dr. Sarig, les signes d’usure identiques visibles sur ces dents, leur orientation et les nombreuses rayures découvertes sur leur face externe prouvent que leurs propriétaires « utilisaient un ustensile de silex pour couper la nourriture. Ils tenaient leurs aliments dans leur bouche, en les tirant d’une main et les coupaient à l’aide d’un outil. »

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Crédit : Rachel Sarig

Les archéologues ont trouvé dans la grotte de petits outils en silex, souvent récupérés d’outils plus grands utilisés pour découper la viande. Ils estiment que ces ustensiles étaient un genre de couverts primitifs. Autre conclusion de l’étude : la grande érosion des dents, bien qu’elles aient appartenu à des adolescents, qui montre que leur nourriture était dure et demandait une longue mastication.

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Crédit : Rachel Sarig

Une précédente étude de la plaque dentaire sur des dents trouvées dans la grotte, publiée l’été dernier, avait permis d’identifier de minuscules particules d’amidon et de fibres, impliquant que le régime alimentaire de leurs propriétaires ne se composait pas uniquement de viande, mais aussi probablement de racines et de légumes. Selon le Dr. Sarig, la présente étude montre que les habitants de la grotte de Qesem étaient munis d’un système de mastication très fort, avec d’énormes mâchoires beaucoup plus développées que celles de l’homme moderne. Ceci pourrait expliquer pourquoi 70% de la population moderne a besoin de soins dentaires, et d’où vient le problème des dents chevauchées ou des dents qui poussent dans la gencive par manque de place lors de la sortie des dents de sagesse.

«Aujourd’hui, nous enlevons même la croûte du pain pour les enfants » relève le Dr. Sarig. « Si vous n’utilisez pas vos dents pour transformer les aliments, les muscles, les os et tout le système de mastication s’atrophient ; par contre la taille des dents qui dépend davantage de la génétique, est resté plus ou moins la même au fil des millénaires. D’où les problèmes ».

Une des questions qui reste à résoudre est celle du type d’hominidé qui habitait la grotte de Qesem. Selon le Prof. Gopher, les dents retrouvées ne correspondent pas à celles de l’Homo erectus, considéré comme le premier à avoir migré d’Afrique en Eurasie il y a 1,7 million d’années. « Le débat qui se déroule actuellement est de savoir s’il s’agit d’un être humain anatomiquement moderne ou d’un Néandertalien » dit-il. « Il est possible qu’il s’agisse de leur ancêtre commun ». Mais les outils et les techniques utilisées par les habitants de la grotte montrent qu’ils étaient tout près de nous sur l’échelle de l’évolution. « C’est un genre d’être humain différent de celui qu’il y avait ici auparavant » dit le Prof. Gopher, se référant à l’Homo erectus. « La technologie, l’utilisation du feu, tout indique un nouveau type d’hominidé, plus proche de nous ».


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