Qui ose encore penser qu’Israël est la source des problèmes au Proche-Orient ?

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Alors, qui ose encore penser qu’Israël est au coeur des problèmes du Proche-Orient ?

Dès que les régimes du Moyen-Orient se sentent menacés par leur propre peuple , ils cherchent immédiatement à blâmer Israël ou « les Juifs ». Oubliez le massacre de milliers de personnes en Syrie et en Egypte, que ce soit par des armes chimiques ou autres méthodes classiques d’élimination de masse, car la question du Moyen-Orient qui galvanise encore certaines de nos méga-stars et leurs fans reste le sort qu’Israël réserve aux Palestiniens.

Tel ce violoniste, Nigel Kennedy, qui déclare à son auditoire lors d’un concert qu’Israël devrait « se débarrasser de l’apartheid » – référence tendancieuse quand au traitement de la minorité arabe dans ce pays. Ses remarques ont été acclamés par beaucoup parmi le public du Royal Albert Hall, mais la BBC a choisi de les couper lors de sa retransmission télévisée du concert, paraît-il à la suite d’une plainte déposée par Lady Deech, ancienne gouverneur… La Palestine Solidarity Campaign, basée à Londres a sauté sur l’occasion, déclarant que « la suppression de la liberté d’expression et la dissidence politique était la norme pour les radios d’Etat sous dictature . Il est inquiétant de commencer à voir ce genre de répression pratiquée par notre propre radiodiffuseur d’État ». Cette allusion remarquable au fait que la BBC agirait en tant qu’Etat censeur, au nom du gouvernement (plutôt que de simplement démontrer sa détermination à ne pas voir son grand festival de musique tourner en plate-forme de slogans politiques litigieux) est un exemple de la façon dont l’Etat d’Israël fait perdre tout sens de la perspective à toute sorte de gens. Tout comme Roger Waters des Pink Floyd qui a immédiatement lancé un appel aux armes “à mes collègues rock’n’roll ” sur le traitement réservé à « mon frère Nigel Kennedy » : “Waters a dénoncé une baronne Deech (née Fraenkel), qui a contesté le fait qu’Israël est un Etat d’apartheid “.

C’est quoi ce : ‘née Fraenkel’ ? On peut supposer que c’est la voie par laquelle la rock star tente de nous faire savoir que Lady Deech est – aha! – juive… En ai-je assez dit – bien que Roger Water ait poursuivi par le fameux : « J’ai beaucoup d’amis juifs très proches ». Peut-être certains de ces amis – qu’ils adhèrent ou non aux lois alimentaires juives- se sont-ils lassés du dernier ‘coup’ de Pink Floyd … un ballon représentant un cochon sur lequel est imprimé une étoile de David « symboliquement » abattu. Avec une délicieuse ironie, tout boycotter de toutes les choses d’origine israélienne doit maintenant lui-même faire face à des appels au boycott, telle la petite population juive de Düsseldorf, ville allemande qui est la prochaine destination de Waters sur sa route de tournée actuelle .

Vous pouvez considérer que ceci est totalement sans rapport avec le massacre qui se produit dans les rues de Damas – et rationnellement, ce n’est pas faux – mais il en est autrement pour la presse syrienne libre , l’un des relais de la propagande de Bachar Al Assad, qui n’a pas tari de louanges ces dernières semaines pour Roger Waters … quand ces médias ne sont pas trop occupés à affirmer que l’assassinat de centaines d’enfants par un gaz neurotoxique Sarin a effectivement été organisé par la CIA pour le compte d’Israël !

Compte tenu de l’iconographie de l’antisémitisme au Moyen-Orient, de longue date, il n’est pas surprenant que lorsque les régimes de la région se sentent menacés par leur propre peuple, ils cherchent immédiatement à blâmer Israël … ou « les Juifs ». Lorsque la vague de soulèvements populaires, parfois qualifiés de « printemps arabe » a atteint la Syrie, le chargé d’affaires de Damas à Londres est allé déclarer au Newsnight de la BBC, face à un Jeremy Paxman clairement surpris, que « les Israéliens pourraient être derrière … qu’ils pourraient être derrière toute mauvaise chose dans le monde. »

En réalité, le gouvernement israélien était plus dérouté par les soulèvements dans la région, préférant plutôt les dictateurs qu’elle connaissait à la possibilité de régimes islamistes instaurés à leur place. Il n’empêche que ce sont les citoyens israéliens qui sont maintenant en file d’attente pour récupérer des masquess à gaz, et non ceux des États-Unis ou d’Europe, en prévision de ce qui pourrait advenir si le président Obama donne le feu vert au vaste arsenal de l’Amérique pointé dans la direction des sites soupçonnés de détenir les armes chimiques d’Assad .

Il est vrai qu’Israël en 2007 a envoyé huit avions de combat chargés de 17 tonnes d’explosifs pour démolir le site de Dair Alzour en Syrie, dont l’Agence internationale de l’énergie atomique a depuis conclu qu’il a été la base de fabrication d’un ‘gaz graphite refroidi par un réacteur nucléaire non configurépour produire de l’électricité … construite avec l’aide de la République populaire démocratique de Corée’. Israël semble en effet … farouchement obstiné dans la poursuite de son auto- défense dans la région.

Pourtant, l’idée qu’Israël est la cause immédiate de toute tension dans cette partie du monde – et donc de la mer de sang qui balaye l’Egypte et la Syrie – est paranoïaque si ce n’est délibérément mensongère. Dans de nombreux cas, l’origine de ces problèmes remonte à la mort du prophète Mohamed et au clivage entre ses partisans qui croyaient que son successeur devrait être nommé en vertu d’une tradition arabe tribale – tradition plus tard reconnue par les Sunnites – et ceux qui ont insisté pour que son successeur soit de sa famille en nommant le cousin de Mohamed et son fils -Frère Ali – ce groupe reconnu depuis sous l’appellation de Chiites .

Dans certains pays arabes , le pouvoir était détenu depuis des générations par les Sunnites, même si une majorité de la population aurait pu être Chiite. Ce fut le cas en Irak, où une guerre civile sectaire a dégénéré en invasion américaine, désastreuse et erronée. L’inverse est vrai de la Syrie, un pays à majorité Sunnite, encore dominé par les Alaouites, une branche chiite. Sans surprise, les rebelles y sont majoritairement Sunnites, soutenus par les régimes sunnites d’Arabie saoudite et du Qatar, principal bailleur de Bachar et du régime chiite de l’ Iran.

Ce conflit tribal et sectaire, qui a le potentiel de devenir l’équivalent musulman de la guerre de Trente Ans, a autant à voir avec Israël que le conflit entre catholiques et protestants en Irlande ! Et les peuples impliqués se préoccupent très peu, voire pas du tout, du sort des Palestiniens – et certainement encore bien moins que ne s’en préoccupent Nigel Kennedy et Roger Waters .

Pourtant, certains gouvernements occidentaux ont encore l’idée bizarre que si le conflit entre Israël et les Palestiniens était résolu, alors cela aiderait à résoudre tous les autres conflits de la région. Ainsi, le ministre des Affaires étrangères français Laurent Fabius a déclaré la semaine dernière, à la suite d’une réunion avec le Chef de l’Autorité palestinienne, le Président Mahmoud Abbas : ” La question israélo-palestinienne est … peut-être la question centrale de la région. “

Pour être juste envers Fabius , c’est le genre de chose qu’on s’attend à entendre de dignitaires se rendant à Ramallah. Mais, au milieu des émeutes et révoltes en Egypte et en Syrie, on ne peut s’empêcher d’avoir à l’esprit la remarque de l’ex-ambassadeur français à Londres, Daniel Bernard, qui s’est permis de lâcher en 2001 que « tous les troubles actuels dans le monde sont dûs à ce petit pays de merde, Israël.»

L’hypocrisie a entouré cette petite nation depuis sa création en 1948 : le secrétaire de la Ligue arabe avait prononcé, alors même que cinq pays arabes avaient lancé une attaque conjointe contre cet état nouveau-né : ” Ce sera une guerre d’extermination et un mémorable massacre ” A présent, les exterminations et les massacres sont d’origine arabe même si, de toute façon, il sera toujours dit que tout a à voir avec Israël.

Je pense avoir écrit un texte similaire sur cette page il ya plus de six ans – mais malheureusement, celui-ci sera la dernière de mes colonnes dans The Independent. Pour les lecteurs qui ont autant aimé les lire que j’ai aimé les écrire, je suis désolé de vous abandonner. A ceux qui n’ont pas aimé – vous allez pouvoir vous calmer maintenant !

 

Dernier éditorial de Dominic Lawson dans le journal britanique The Independant

 


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