Thibault Breton de la Baronniere, un ami d’Israël aux accents de noblesse

Il y a dans la vie des évènements improbables. c’était un soir de septembre. La rédaction de Coolisrael m’avait confié une mission : interviewer Thibault Breton de la Baronniere.

Il m’a serré la main et s’est assis face à moi. Un jeune homme élégant pas encore la trentaine me confia alors son histoire, son amour pour Israël, ses idées pour Israël, son attachement viscéral à ce petit bout de terre. Lui qui baigna dans la nébuleuse d’un antisémitisme mondain durant sa jeunesse se trouve aujourd’hui  porter de  ses deux  mains le drapeau d’Israël.

Après deux  heures d’entretien passionnant,  je vous livre son propos.

A quelle occasion avez-vous découvert Israël ?

Je ne suis pas né avec la passion d’Israël.

Un intérêt marqué pour la chose publique et le sentiment que la partialité des médias français ne permettait pas de prendre correctement la mesure de la situation, voilà deux éléments parmi tant d’autres qui m’ont poussé à m’intéresser au Proche-Orient. Mais d’aussi loin que je me souvienne, je ne trouve pas d’élément déclencheur probant si ce n’est un faisceau de souvenirs qui forgent une conscience d’être. Il m’a fallu du temps pour mesurer l’antisémitisme mondain dans lequel baigne une partie de la haute bourgeoisie française. C’est la forme la plus pacifique et la plus passive d’antisémitisme qu’il m’ait été donné de voir, celle qui veut que l’on n’ait rien contre les juifs tant qu’on ne les a pas comme amis ou voisins. C’est probablement à cette occasion que j’ai commencé à m’intéresser à Israël.

Arrivé en école de commerce, je contacte l’association de promotion de la culture israélienne du campus, HEC Israël. Un déjeuner plus tard avec une très dynamique Laura, secrétaire générale de l’association, je suis le bienvenu dans l’association et plus que jamais motivé pour aider. Pour la première fois cette année-là, l’association organisait avec les associations sœurs de l’ESSEC et l’ESCP un voyage en Israël. Six mois plus tard, encore épuisés par le vol charter de nuit mais enthousiasmés par le soleil d’Israël, nous posions enfin les pieds à l’aéroport Ben Gurion. Non juifs pour la plupart, la centaine d’étudiants de ce voyage avait souhaité découvrir Israël dans sa diversité. Jérusalem puis Tel Aviv, Césarée puis Tibériade, le Jourdain puis la mer Morte, les bédouins puis Masada, c’est au cours de ce road trip d’une semaine vécue en accéléré et sans temps mort que je découvris Israël. C’est l’une des rencontres de sa vie à laquelle l’on se croit préparé mais dont l’on découvre à rebours qu’elle vous transformera à jamais. C’était en mai 2006, j’avais vingt ans.

Que connaissiez-vous d’Israël ?

J’en connaissais ce que les médias français montraient, ce que mes amis juifs en disaient, ce dont ma mère se souvenait, trente ans après y être allé. Je savais aussi que depuis trop longtemps ce pays souffrait sans relâche des menaces terroristes et militaires extérieures et que sa population, comme la majorité des palestiniens, aspiraient à vivre en paix. De tout cela, j’avais fini par me forger une opinion. Israël c’est un petit bout de terre aux confins de la Méditerranée qu’un grand peuple, déterminé et travailleur, a réussi à faire fructifier en même pas 100 ans.

Vos premières impressions lors de votre voyage initiatique?

Je me souviens de cette soif débordante de vie que l’on lit sur le visage des israéliens comme si chaque lever de soleil apportait l’espoir de nouvelles opportunités. Je me souviens du raz-de-marée humain se dirigeant vers le Mur des Lamentations et que nous avons remonté à contre-courant dans la vieille ville de Jérusalem à l’orée de la nuit de Yom Yeroushalayim – le Jour de Jérusalem venant célébrer la réunification de la ville depuis 1967. Ce pays vous change, vous ébranle, vous frappe. Parce que l’on ne peut pas ne pas changer, lorsqu’arrivé au bout de la visite du mémorial de la Shoah, l’on rentre dans une salle pleine de dossiers où s’égrènent inexorablement, projetés au mur, les millions de photos de juifs assassinés méthodiquement 70 ans auparavant. Parce que l’on ne peut pas ne pas être ébranlé par la foi qui se dégage des murs de la vieille ville de Jérusalem, au croisement des trois religions du livre. Parce que l’on ne peut pas ne pas être frappé par la joie de vivre des israéliens et leur façon de faire la fête jusqu’au lendemain.

Contrairement à beaucoup de pays et de peuples, Israël et les israéliens ne cultivent pas l’image d’un âge d’or révolu, ils portent un espoir, et il est grand, celui que demain sera meilleur qu’aujourd’hui.

L’aristocratie française et Israël ?

Je ne suis jamais partisan de parler au nom d’un groupe de personnes dont je ne suis pas le représentant légitime, si tant est qu’il y en ait un, et ce d’autant qu’il n’y a pas une position unique vis-à-vis d’Israël dans ce microcosme. Je crois que l’on pourrait répartir en trois grandes catégories la perception d’Israël par cette catégorie sociologique très petite.

Il y a ceux qui voient en Israël, à juste titre, la seule démocratie de la région. Partisans d’une paix à deux Etats, ils condamnent systématiquement le terrorisme islamiste et les atteintes à la sécurité d’Israël mais ne soutiennent pas pour autant systématiquement la politique du gouvernement israélien. Ils portent un regard plein d’un respect teinté d’admiration pour ce petit pays fondé au sortir de la seconde guerre mondiale et qui a réussi le formidable exploit de se hisser dans les premiers rangs mondiaux pour son éducation supérieure, son budget de recherche et développement et ses entreprises de haute technologie notamment.

D’autres ne différencient pas – volontairement ou non – l’Etat d’Israël du gouvernement israélien et, en condamnant les mesures du second, arrive à en justifier les attaques portées au premier. Pour eux, les racines originelles des problèmes actuels remontent à la création de l’Etat d’Israël et au fait que la partition de 1947-1948 est souvent considérée comme illégitime. Tapi dans l’ombre de ceux-ci, l’antisémitisme mondain fait passer ses idées.

Les derniers enfin voient en Israël la Terre Sainte multimillénaire, un lieu de pèlerinage pour les croyants des trois religions du livre. Qu’il y ait des juifs, des musulmans, des chrétiens, et parfois des tensions ou des conflits, finalement pour eux, c’est le sens de l’histoire. Qu’Israël soit un pays pour les juifs, c’est finalement là encore le sens de l’histoire. Le terrorisme ? Les négociations de paix ? Tout cela semble être inhérent à cette région. Bon gré, mal gré, ils s’accommodent de la situation présente et alternent entre territoire israélien et palestinien pour visiter les lieux saints.

La réaction de votre entourage ?

Pourquoi Israël ? Voilà la première question qui venait tout de suite à la bouche des gens. Ils cherchaient à comprendre alors ils écoutaient. Les gens ont d’abord été surpris mais ils l’ont accepté. Certains ont d’ailleurs finalement décidé de s’engager de la même manière. L’engagement pour les valeurs et les idées que je défends est partie intégrante de ma vie. Je suis engagé en politique comme je le suis pour Israël. Je le fais parce que j’ai la profonde conviction d’apporter une valeur ajoutée et complémentaire aux autres personnes engagées dans cette même volonté de mieux faire connaitre Israël. Que quelqu’un de ma sociologie s’intéresse et s’engage pour Israël suscite beaucoup de curiosité et crée une opportunité unique de dialogue pour faire passer des messages.

La découverte des israéliens ?

Israël a su faire de la diversité de sa population une richesse. Les israéliens sont plus matures plus jeunes qu’ailleurs dans le monde. L’armée leur forge le caractère et l’esprit et le tour du monde que beaucoup font ensuite achève de leur ouvrir les yeux sur la diversité de cette planète. Je suis allé quatre fois en Israël. J’ai eu la chance de rencontrer beaucoup d’israéliens, à Jérusalem et Tel Aviv évidemment mais aussi dans des kibboutz, à Sderot, dans le Golan, dans le désert du Neguev. Plus que dans n’importe quel endroit au monde, ce qui caractérise le plus les israéliens, c’est cet amour de la vie. Regarder chaque lever de soleil comme l’aube d’une journée pleine de nouvelles opportunités, entretenir l’espoir que demain sera meilleur qu’aujourd’hui.  Il se détache des israéliens un sentiment d’appartenance collectif à une aventure qui les dépasse. Ils semblent tous ensemble tournés vers le même objectif : continuer à développer cette terre à laquelle ils tiennent tant.

Les aristocrates en faveur d’Israël ?

Je ne saurais faire une réponse générale, cela n’aurait pas de sens. Ce que je sais, c’est que je ne suis ni un cas isolé ni un cas unique. Les raisons de ce soutien en sont diverses mais comme je l’ai catégorisé précédemment, elles ne manquent pas.  Pour ceux qui partagent ma vision des choses, cet engagement – public ou non – sonne comme une évidence. L’existence d’Israël est la seule assurance théorique qu’il ne se reproduira pas ce qu’il s’est passé pendant des siècles pour le peuple. Cette philosophie d’engagement, je l’ai trouvé résumée dans l’introduction du livre de Jacques Mercier, ancien parlementaire français, intitulée Parti pris pour Israël. « Depuis que tant de non-Juifs sont antisionistes, il apparait qu’il n’est plus besoin d’être juif pour porter un jugement en la matière ; je suis donc sioniste », avait-il écrit avant d’expliciter ses raisons personnelles dans son livre. L’intérêt que notre engagement pour Israël suscite auprès des gens est déjà une victoire.

Les motivations de la création de votre projet : Israël Institute

Au sortir de mon école de commerce, je fus, comme bon nombre de mes amis, confronté à un vide associatif. Nous avions évolué pendant quatre ans dans un monde où l’engagement bénévole était la norme et nous permettait de nous forger notre personnalité. Nous nous retrouvions balancés sans avertissement dans la vie active, un monde où le bénévolat donne trop souvent, et à tort, l’impression d’être réservée aux mères aux foyers. L’envie de continuer cet engagement pour Israël m’a poussé avec une poignée d’amis basés en France et aux Etats-Unis à fonder un think tank apolitique et non confessionnel appelé Israël Institute. Cette structure comble un vide en France. Aucune organisation jeune non communautaire ne travaille sur le fond sur les sujets liés à Israël qu’ils soient d’ordre économique, intérieur ou international.

Nous visons à renforcer le dialogue autour d’Israël. Nous ne sommes pas dans une logique de débat. Dans un débat, chaque débatteur essayera de l’emporter sur les autres pour que ses idées triomphent. Dans le dialogue, la diversité des points de vue est représentée de manière équitable. C’est ce à quoi nous travaillons. Nous nous définissons comme des amis d’Israël. Un ami, c’est quelqu’un qui dit franchement ce qu’il pense, ce qui est positif et ce qui l’est moins, pragmatiquement, en essayant autant que faire se peut de se fonder sur des arguments objectifs et étayées.

Nous soutenons l’Etat d’Israël mais nous ne prenons aucune position vis-à-vis des gouvernements israéliens successifs.

Une anecdote remarquable d’un de vos voyages en Israël ?

C’était en 2008, ma deuxième fois en Israël. Nous étions partis 4 jours, ma petite amie de l’époque et moi, sa première fois en Israël. Au programme, deux jours à Jérusalem et deux jours à Tel Aviv. Le deuxième jour à Jérusalem, nous montons dans un taxi pour nous rendre au Mont des Oliviers. Il s’appelait Avi, il parlait très mal anglais et à l’époque, je n’avais pas encore commencé à apprendre l’hébreu. Mais il parle espagnol et moi aussi ! Toute la conversation se fait donc en espagnol. Il m’explique qu’il a émigré d’Espagne dans les années 60. Nous nous entendons bien et nous négocions alors qu’ils nous accompagnent jusqu’à notre retour à la gare routière de Jérusalem pour repartir à Tel Aviv. Il a été notre guide pendant toute l’après-midi  sur le Mont des Oliviers, dans les vieux cimetières juifs sur les collines, dans l’église en contrebas. Il a insisté pour que je prenne son numéro et que je l’appelle si je revenais, 2h30 pour 40 shekels (environ 8 euros) un prix imbattable !

Un message pour les internautes de Coolisrael.fr

Israël doit faire face depuis plusieurs années maintenant à la plus intense et systématique campagne de désinformation à son égard que le pays n’ait jamais connu. C’est l’engagement de chacun, quel que soit son ampleur, qui permettra de rétablir une vision équilibrée et juste de la situation. Allez découvrir Israël ! Parlez-en autour de vous ! Et rendez-vous l’an prochain à Jérusalem.


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